Tigray Conflict: Terror in Adi Gudem | RFI

Sébastien Nemeth
18 June 2021

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The conflict has been going on since November in Tigray region. This northern region is still plagued by violence between the former TPLF government on the one hand and the federal army, Eritrean soldiers and Amhara militiamen on the other. The conflict has resulted in thousands of deaths and considerable damage. Multiple abuses have been documented, mostly perpetrated by the Ethiopian and Eritrean armies, whose soldiers now inspire terror and anger among the Tigrayans.

Adi Gudem. The military is everywhere in the streets of this city in Southern Tigray. The federal army has been using it as a base since November. The Eritreans stop here for a few days before leaving. The inhabitants accuse both contingents of committing crimes.

“My son was returning to the herd when a soldier called him and shot him for no reason. A mother should not bury her child. Since that day, I don’t go out much,” says Hira, 60. I get angry every time I see a soldier. If I had been younger, I would have fought against them. My other son joined the rebels after his brother died. I couldn’t dissuade him. Now I’m afraid of losing him too. The military should be exemplary. But these are demons.”

The soldiers are also accused of robbing the residents. Shops in the town were ransacked and looted. Kendeya owns a store that was robbed by soldiers.

“Soldiers entered by breaking a window. They stole cash from the cash register and SIM cards. One of them pointed his Kalashnikov at my wife and asked her if she wanted to die. He said that our people were killing their friends and that this robbery was nothing compared to what they could do to us. Another soldier hit me for no reason. They asked me to go and knock on the neighbors’ doors so they could enter. I told them that I would rather have them shoot me than help them kill my people. Finally they left. We are always afraid they will come back. We no longer keep money in the store and we don’t buy any more goods, because they could steal everything.”

Since the arrival of the soldiers, the inhabitants have been living in fear. Fear of being attacked, beaten up, or worse, executed. A group of young people play football in a shopping street in the city. They constantly look around to see if a soldier is coming.

“We are all very scared. When they patrol during the day, sometimes they stop and beat people up for no reason. It traumatizes us. They especially target young people. At night, the soldiers drink and go door to door to rob people,” said Milin [Million], 24. It feels like a strategy. They have been ordered to terrorize us. When you see the Eritreans, the fear is even greater. Even the young girls take refuge in the villages to avoid being raped. Everyone is hiding, because we have all heard what they did in Tigray. It looks like the two forces have made a deal to destroy all of Tigray.”

And as if to illustrate the situation, Milin and his friends suddenly stop their game and run away as two Eritrean soldiers with AK47s cross the street in their direction.

Source: RFI


Conflit du Tigré: terreur à Adi Gudem [5/5]
Publié le : 18/06/2021 – 00:56

Le conflit dure depuis novembre dans la province du Tigré. Cette région du Nord toujours en proie à la violence entre l’ancien pouvoir du TPLF d’un côté, l’armée fédérale, des soldats érythréens et des miliciens Amharas de l’autre. Le conflit a fait des milliers de morts et entraîné des dégâts considérables. De multiples exactions ont été documentées, essentiellement perpétrées par les armées éthiopiennes et érythréennes dont les soldats inspirent désormais terreur et colère chez les Tigréens.

Adi Gudem. Les militaires sont partout dans les rues de cette ville du sud du Tigré. L’armée fédérale s’en sert de base depuis novembre. Les Érythréens, eux, s’y arrêtent quelques jours avant de repartir. Les habitants accusent les deux contingents d’avoir commis des crimes. 

« Mon fils rentrait le troupeau quand un militaire l’a appelé et l’a abattu sans raison. Une mère ne devrait pas enterrer son enfant. Depuis ce jour, je sors très peu, confie Hira, 60 ans. Je suis en colère chaque fois que je vois un soldat. Si j’avais été plus jeune, je me serais battue contre eux. Mon autre fils, lui, a rejoint les rebelles après la mort de son frère. Je n’ai pas pu le dissuader. Maintenant, j’ai peur de le perdre aussi. Les militaires devraient être exemplaires. Mais ceux-là sont des démons. »

Les soldats sont également accusés d’avoir dépouillé les habitants. Des boutiques de la ville ont été saccagées et pillées. Kendeya possède un magasin qui a été braqué par des militaires.

« Des soldats sont entrés en cassant une fenêtre. Ils ont volé l’argent de la caisse et des cartes SIM. L’un d’eux a pointé sa kalachnikov sur ma femme et lui a demandé si elle voulait mourir. Il a dit que notre peuple tuait ses amis et que ce vol n’était rien comparé à ce qu’ils pourraient nous faire.

Un autre soldat m’a frappé sans aucune raison. Ils m’ont demandé d’aller frapper aux portes des voisins pour qu’ils puissent entrer. Je leur ai dit que je préférais qu’ils m’abattent plutôt que de les aider à tuer mon peuple. Finalement ils sont partis. On a toujours peur qu’ils reviennent. On ne garde plus d’argent au magasin et on ne rachète plus de marchandises, car ils pourraient tout voler. »

Depuis l’arrivée des soldats, les habitants vivent donc dans la crainte. Crainte d’être pris à partie, tabassés, voire pire, exécutés. Un groupe de jeunes jouent au babyfoot dans une rue commerçante de la ville. Ils regardent constamment autour d’eux pour voir si un soldat arrive.

« On a tous très peur. Quand ils patrouillent la journée, parfois, ils s’arrêtent et tabassent des gens sans raison. Ça nous traumatise. Ils visent particulièrement les jeunes. Le soir, les soldats boivent et font du porte à porte pour dépouiller les gens, rapporte Milin, 24 ans. On a l’impression que c’est une stratégie. Qu’on leur a ordonné de nous terroriser. Quand on voit les Érythréens, la peur est encore plus forte. Même les jeunes filles se réfugient dans les villages pour éviter d’être violées. Tout le monde se cache, car on a tous entendu ce qu’ils ont fait au Tigré. On dirait que les deux forces ont passé un accord pour détruire tout le Tigré. »

Et comme pour illustrer la situation, Milin et ses amis arrêtent soudainement leur partie et s’enfuient en courant alors que deux soldats érythréens équipés d’AK47 traversent la rue dans leur direction.

Source: RFI